The creature who plucked the most beautiful of roses. (UA!Beauty & The Beast)

Noël avait été banni de chez moi. Les villageois pouvaient le célébrer s'ils le voulaient, dans leurs chaumières lointaines. Mais ce n'était plus le cas depuis longtemps, dans la mienne. Parce que ça n'avait plus la même signification. Parce que toute la magie liée à ce jour avait éclaté en milliers de morceaux, d'un seul coup. En un claquement de doigt, toute la chaleur et la joie de cet événement s'étaient volatilisées, pour laisser place au froid et à l'obscurité. Quand tous les habitants se réunissaient avec leur famille, jouissant du réconfort de leurs proches, je devais faire face au silence et à l'absence des miens. Il n'y avait rien de plus que les pierres glacées et le vide, le vent qui s'engouffrait dans les couloirs et la mort imprégnée entre les murs de ce château. Le vingt-quatre décembre, on m'avait séparé des êtres qui m'étaient les plus chers. On m'avait arraché tout ce qui faisait mon bonheur en ces terres. Et on me demandait de continuer à vivre avec leur souvenir, sans pouvoir à nouveau les serrer dans mes bras, de festoyer alors qu'ils m'avaient enlevé ceux avec qui j'aurais voulu partager ces instants. Il n'y avait plus le moindre intérêt à célébrer ce jour et j'avais fait le choix de refuser d'y prendre part. Si je ne le faisais pas, personne n'en avait le droit, ici bas parce que je n'aurais pas supporté de savoir qu'il y avait des gens qui se réjouissaient pendant que je traînais le poids écrasant de ma peine et de mon deuil en cette sombre journée. Et même le visage consterné d'Alexa n'avait pas été suffisant pour changer la donne, à son plus grand dam. Rien ni personne n'aurait su déloger la détresse tapie dans mon coeur, au rappel de l'anniversaire de leur disparition. Il ne me restait plus qu'à attendre, qu'à regarder les heures passer en espérant qu'elle finirait par s'atténuer.

Après avoir observé le tapis de neige qui recouvrait les jardins avec une régularité sans pareille, je finis par retourner à l'intérieur pour rejoindre mes quartiers. Mais je m'arrête net, au détour d'un couloir. De la lumière filtrait sous les grandes portes de la salle de bal et je sens mon coeur battre une mesure plus soutenue. Mon corps se met en mouvement de son propre chef et je me retrouve d'un seul coup devant les armoiries de ma famille, les mains tremblantes. Je n'étais pas retourné à l'intérieur depuis bien longtemps et je n'osais imaginer ce qui pouvait se tramer de l'autre côté. Alexa ne devait pas y être étrangère, j'en étais certain mais je ressentais une forme de crainte à l'idée de passer la porte. Et je prends une profonde inspiration, fermant les yeux un court instant avant de pousser les battants pour me donner accès à la pièce. Cependant, je fige aussitôt, muet de stupeur.

Toute la salle avait été richement décorée pour l'occasion, un sapin immense trônait en son centre et la jeune femme se trouvait à son pied, encadrée par les objets magiques. Un feu crépitait dans la cheminée et déposait des teintes chaudes sur les éléments qui composaient la scène et j'avais l'impression d'avoir fait un bond dans le passé. Je pouvais voir mes parents danser l'un contre l'autre, mon père fait tournoyer ma mère et celle-ci lui répondre avec de grands éclats de rire. Les conversations animées des quelques invités présents, parés d'habits chatoyants et la montagne de présents disposés sous l'arbre scintillant. Le parfum de mes proches quand ils me serraient contre eux, le battement régulier de leurs coeurs ainsi que cette sensation de plénitude qui n'avaient rien de comparable au monde. Et je sens mon coeur se tordre douloureusement dans ma poitrine. Parce que je n'aurais plus jamais la chance de vivre ça, de pouvoir ressentir leur présence à mes côtés et la joie infinie qui investissait mon âme à cette occasion. Ils n'étaient plus là et rien ne valait plus la peine. D'un seul coup, je sens l'énergie changer en moi, la mélancolie se transformer en colère et mes membres se figent, mes mâchoires se contracter. La voix d'Alexa résonne dans la pièce mais elle s'arrête en plein milieu quand son regard croise le mien. Et qu'elle comprend. « Je vous l'avais interdit. » je siffle, sur un ton aussi tranchant qu'une lame en acier trempé. « Mais vous ne pouvez pas vous en empêcher hein ? » je poursuis, avec un rictus méprisant. « Vous en faites toujours à votre tête, sans respecter les autres. Vous ne réfléchissez jamais aux conséquences de vos actes et à la peine que ça peut infliger à ceux qui en sont la cible. Vous vouliez fêter Noël et vous avez décidé qu'il en serait ainsi. » je murmure, sur un ton glacial. Elle n'avait pas pensé un seul instant à la raison de cette interdiction. Elle n'avait jamais posé la question et elle avait sûrement supposé que ce n'était qu'un caprice de ma part. « Très bien. Profitez-en, dans ce cas. » je cingle, avant de faire demi-tour sur moi-même pour repartir dans l'autre sens.  

Je refusais de m'infliger cette mascarade.

@"Lexa Debrand"

Noel, signifiait tant de choses. La neige recouvrait le sol. Le froid berçait la contrée, et préparait le renouveau de la prochaine saison, lorsque le soleil aura repris de la force sur les nuages grisonnants. C’était la magie, les couleurs scintillantes et merveilleuses qui sortaient des maisons. Des centaines de lampions allumés de partout, qui diffusaient une chaleur dont elle était autant physique que mentale. Surtout, c’était les rires par centaines, qui émanaient des personnes qui célébraient. L’amour, qui débordait de chaque maisons. Des enfants heureux, des familles unies, bercée d’une douceur que l’on n’égalait pas. Le temps s’arrêtait, pour ne laisser place, qu’un court instant, à une particulière félicité. C’était pour moi, l’occasion de me réunir avec mes proches, de prendre le temps de savourer une histoire au coin du feu, d’apprécier la chance que j’avais de les avoir à mes côtés, quand parfois, la maladie décimait ce que l’on aimait, sans crier gare. J’attendais toujours ce moment avec impatience, comme le plus beau moment de l’année, qui avait ses traditions, ses moments à lui. Les miennes éteint bousculée cette année. Les saisons avaient fait leur renouveau et je les regardais changer au fur et à mesure du temps, en flânant dans les jardins, ou derrière les immenses fenêtres du château. C’était la première fois que je ne fêtais pas la nativité dans la chaumière de mes parents. Première fois que je le faisais seule, ou presque. Une part de moi était profondément attristée. J’aurais voulu avoir quelqu’un pour partager avec moi ces moments de pur plaisir. Pour partager un peu de mes traditions.  Wyatt n’était pas la meilleure compagnie pour prendre part à la fête, ces derniers temps. Si j’avais cru que j’avais réussi à percer son être à jour il n’ne était foutrement rien. Nous étions retombés dans un silence qui me brisait le cœur plus que je ne souhaitais bien l’avouer. Il était perdu dans une sorte de léthargie qui m’était inconnue, constamment replié sur lui-même. Il ne se rendait même pas compte de ce qu’il se passait autour de lui, comme complètement hermétique à tout, même à moi. Je tentais, d’être là pour lui, de lui prouver qu’il n’était pas seul, mais rien n’y faisait. Alors j’avais décidé de prendre le taureau par les cornes et de tenter par tous les moyens, de quand même célébrer cette fête si chère et particulière à mon cœur.


Je savais la tragique histoire qui entourait le château, lors de cette fête, mais pour avancer il fallait que l’on sorte de ce passé, que l’on se dise que c’était possible de se sortir de cette torpeur si on s’y mettait ensemble. Je voulais transformer ces soirées d’horreur et de solitude en quelque chose de plus doux, de plus chaleureux, continuer à faire rentrer le soleil et la lumière dans son univers. Pour ça, il fallait qu’il m’en laisse l’occasion, mais rien n’y faisait. Si je n’avais pas son accord, j’allais me l’octroyer moi-même. Il ne pourra pas m’en vouloir, ou pire m’enfermer. Ce serait sa peine, si je retrouvais dans une froide geôle, loin de lui. Je ne sais pas qui de lui, ou de moi, serait le plus malheureux. En attendant, j’avais pris le temps et le soin de transformer l’une des plus belles pièces du château, pour en faire l’univers que je voulais. La salle de bal était immense, comportait l’une des plus belles cheminées du château et j’avais un terrain de jeu parfait pour faire tout ce que ma petite chaumière ne pouvait pas accueillir. Des énormes rubans, un sapin qui faisait sûrement deux fois ma taille, qui débordait de décorations travaillées à la main, et scintillantes. Le cristal se mélangeait parfaitement aux figures de bois, et donnait un aspect merveilleux au conifère. Mes petits assistants magiques, avaient rendu la tâche plus amusante et agréable. C’était une véritable prouesse que d’avoir réussi à faire tout ça, ici. Mais c’était plus beau encore que tous mes rêves réunis.


Moi-même, je n’avais pas rechigné sur les efforts, lorsqu’il avait fallu me vêtir pour la soirée. J’avais trouvé la plus belles des parures dans les placards qui ornaient ma chambre. Mes boucles retombaient dans mon dos, je ne m’étais que rarement trouvé si bien, depuis mon arrivée ici. J’avais retrouvé tous les habitants magiques et Leonard dans la salle de bal, il ne manquait que lui. Lui, qui finit par pousser les portes, sans crier gare, et faire face à cette surprise. J’observe son regard se teinter d’une tristesse presque résiduelle depuis quelques semaines, avant qu’il ne change complètement, lorsque je m’approche et que j’ose ouvrir la bouche pour tenter une explication brisée dans l’œuf. Pire, mon cœur en prend un coup, quand il n’utilise plus une seule forme de familiarité entre nous. Ses mots sont tranchants, froids, pire, dénué de la sympathie qui l’avait caractérisé avant que l’homme que j’avais entraperçu ne disparaisse. Je ne trouve rien à dire. J’en avais effectivement fait qu’à ma tête, mais c’était aussi pour lui que je l’avais fait. Il se tourne, prêt à sortir après avoir déversé sa colère. Mais je ne peux pas le laisser sortir, pas comme ça. « Je l’ai fait pour toi ! » Je lâche de but en blanc. « Je ne supporte plus de te voir triste en permanence. Je sais ton histoire. Je sais pourquoi tu hais tellement cette fête. Je sais tous les souvenirs qu’elle te procure. Mais je voulais apporter un peu joie, un peu de chaleur. » Je m’explique en m’approchant doucement, pour venir poser ma main sur la cape qui recouvrait son épaule. « Tu es tellement abattu. Si distant, si froid. Je voulais simplement transformer de mauvais souvenir, en quelque chose de mieux. Les choses changent, je voulais apporter de la couleur à des souvenirs trop noirs. » Je murmure en espérant que ça puisse le convaincre, même si dans le fond, égoïstement, je ne voulais pas me passer de cette tradition. « Ne m’en veux pas. J’y ai simplement vu une occasion d’essayer de te rendre heureux. » Finis-je dans un souffle triste.

Ne me déteste pas.







@Wyatt Forbes