Christmas trees, snow and love

J'avais absolument tout entendu au sujet de ce fameux Kellen. Non pas de la bouche de Poppy, mais de celle d'Oz, ce dernier ayant absolument tenu à m'expliquer toute leur histoire de A à Z. Et j'avais dû m'accrocher pour ne pas finir complètement larguée par autant de rebondissements dans la vie de deux personnes. Ils menaient tous les deux une existence mouvementée à laquelle je n'étais pas certaine de survivre si j'étais à leur place. Mais de ce que je connaissais de Poppy et du peu que j'avais eu comme information sur son compagnon, ça leur correspondait plutôt bien. J'étais toutefois curieuse de découvrir l'homme qui, d'après Oswald, avait rendu à sa meilleure amie toute sa lumière, mais semblait  tout de même avoir un sacré caractère. Et mes sourcils se rehaussent quand il osé employer le surnom qu'utilisait la rousse pour parler de lui avec ses meilleurs amis. « J'ai été ravie de te rencontrer. » je souffle, en posant théâtralement ma main sur son épaule. Oui, j'allais le laisser se dépatouiller tout seul.

Puis on nous invite à nous installer à table, je m'assois entre les deux hommes de ma vie, fronçant les sourcils devant l'insistance avec laquelle Auggie regarde notre hôte. Et je me rappelle avec quelle fascination il avait écouté Ozzie lui raconter le métier qu'il faisait. Il avait déjà inonder Poppy de questions à ce sujet, mais maintenant qu'il était dans sa période policier et pompier, j'étais persuadée qu'il mourrait d'envie de recommencer. « Ne sois pas timide... » je lui murmure à l'oreille avant d'ébouriffer ses cheveux. Il râle à coup de « Maman-euuh. »  avant de recommencer à fixer Kellen. « C'est vrai que tu es un super-héros et que tu arrêtes les méchants avec tata Poppy ? »

« Toujours là pour te soutenir, mon frère. » je souffle, en tapotant l'épaule de mon meilleur ami. Puis je demande à voir le sauveur de ses dames, bien entendu. Monsieur Grognon est juste ici. Mes yeux pivotent en direction de la voix glaciale et retrouvent ceux de Kellen. Je l'avais déjà rencontré à l'hôpital, mais autant dire que ce n'était pas dans le meilleur contexte. Là, il était plutôt beau-gosse avec sa chemise bordeaux, je devais l'avouer. J'entends la menace soufflée à travers les lèvres de Poppy, à mes côtés et je lève les yeux innocemment au ciel. « Oups ? » je lâche, faussement candide. Avant de répondre au brun, posant théâtralement la main contre mon coeur. « Tu n'aurais pas osé gâcher le Noël de notre petit homme avec un repas immangeable. » je chantonne, sur un petit air satisfait. « Tu te donnes un genre d'ours des cavernes, mais je sais il y a un petit coeur tout mou, qui bat dans ta poitrine. » Tout ça, en hochant la tête avec un air concerné. Et un sourire qui doit lui donner envie de m'arracher la tête des épaules. Ce dont il est certainement capable, à mon avis. J'ai peut-être légèrement peur pour ma vie. Nous nous installons et je capte le regard intense que porte Auggie au compagnon de Poppy. Une expression démoniaque étire mes lèvres à la question qu'il ose enfin poser. Cet enfant était un génie du mal, sans même le savoir. Et je pose mes coudes sur la table, entrelaçant mes doigts et posant mon menton par-dessus. « Oh oui, raconte-nous, Père Kellen. » je rajoute, sans cacher le large rictus qui étire mon visage.

Kellen avait un sale caractère, c’était indéniable. Tout le monde ici présent le savait, ce n’était une surprise pour personne. Je m’étais suffisamment plainte de mon insupportable collègue pour que la Terre entière soit au courant. Fort heureusement, tout ne se résumait pas à son air renfrogné et sa fâcheuse tendance à râler pour un rien. J’étais heureuse avec lui, en plus de me sentir aimée et protégée. Je n’aurais échangé mon Monsieur Grognon pour rien au monde, et ce malgré ses innombrables piques concernant mon manque cruel de talent en cuisine. En revanche, présentement, j’aurais bien échangé l’un de mes meilleurs amis. Je foudroie Ozzie du regard, lui promettant de me venger pour cet affront. Puis je joue les innocentes auprès du brun, parce que c’est ce que je suis. Je n’y peux rien si mes amis sont des abrutis qui ne tiennent pas à ma pauvre vie. Je lui lance un "Je t’aime" silencieux, préférant ignorer la réflexion sur le repas ignoble que nous aurions eu, si il ne l’avait pas sauvé. Je lui en devais une, je le savais. Puis je me retiens de glousser quand Oz reprend la parole, me demandant si il savait dans quoi il s’embarquait en s’adressant ainsi à Kellen.

Finalement, nos convives s’installent à table et je m’éclipse en cuisine pour rapporter les petits fours pour l’apéritif. A défaut de savoir les faire cuire sans les brûler, je maîtrisais le service, tout n’était pas perdu. Je laisse Kellen s’occuper des boissons et, quand je reviens, mon coeur se gonfle d’une douce chaleur quand la voix d’Auggie résonne dans le salon. Tata Poppy. Est-ce qu’il se pourrait que ça me fasse intérieurement couiner ? Oui, absolument. Ce petite bonhomme était un véritable amour qui me faisait fondre à chaque fois. Puis je me tourne vers Kellen, un doux sourire étirant mon visage. « Je suis persuadée qu’il est très impatient d’entendre toutes les histoires que tu as en stock. »

Je n'ai pas rencontré Oswald et Ruben dans les meilleures conditions qu'il soit, vu que nous nous sommes croisés pour la première fois dans les couloirs de l'hôpital après le sauvetage de Poppy. Mais je n'aurais jamais pu me douter qu'ils soient de tels énergumènes. Et je n'arrivais toujours pas à comprendre comment elle arrivait à les supporter. Enfin, il était préférable de dire que mon seuil de tolérance était plutôt bas, pour être honnête. Surtout que le bougre savait généralement où taper pour m'emmerder. « La prochaine fois, tu réveillonnes sur le paillasson. » je lâche, les yeux plissées en deux fentes menaçantes. Puis j'invite tout le monde à s'installer autour de la table avant de capter le regard insistant du fils de Louve. Le garçon allait fêter son premier Noël depuis son réveil et je devais avouer que c'était ma préoccupation principale. Un infime sourire étire mes lèvres à sa question et je hausse les épaules, posant mes avant-bras sur le bord de la table. Mordant l'intérieur de ma joue à la réflexion du châtain pour ne pas lui donner la satisfaction de me mettre mal à l'aise. Je prends une courte inspiration avant de répondre au petit garçon, sur le ton de la confidence : « J'essaye toujours d'apprendre à voler, malheureusement. » Puis je jette un regard complice à la rousse avant de reprendre, traçant par réflexe des cercles concentriques sur la nappe, du bout des doigts. « Mais oui, nous arrêtons les criminels avec Poppy. » je souffle, un ton aussi abordable que possible. « Est-ce qu'elle t'a déjà expliqué la fois où nous avons infiltré la maison d'un grand méchant et que notre voiture a explosé ? » je l'interroge, en rappel de cette mission dans la villa de Gúzman. « Elle a même utilisé ses chaussures à talons pour se battre. » je termine, avec un petit ricanement.  

Les présentations avaient peut-être été déjà faites de la bouche de notre rouquine, ou un pauvre et malheureux résumé, très peu fidèle j’en suis sûr des incroyables personnes qu’Oswald et moi étions. Elle ne vaudra jamais une vraie présentation de ma part, alors quand je découvre avec joie et surprise que je suis attablé aux côtés de celle que l’on présente comme la meilleure amie du l'homme grognon, je prends les devants et me présente, tendant une main polie et avenante dans sa direction. Mon visage s’illumine d’un immense sourire amusé à sa réponse. « Enchanté ! Je serais curieux de savoir ton secret. » Je lance sans aucun sous-entendu. J’étais simplement très intéressé sur le modèle de survie en compagnie d’un homme qui à Gneuhgneuh comme phrase type dans la vie. « Vraiment ? Qu’a donc bien pu raconter Kellen à notre sujet ? » Je demande avant que l’attention ne se porte sur le petit garçon autour de la table. Adorable cela dit quand un peu stressé il questionne le membre des forces de l’ordre sur ses activités. « Une histoire ! Une histoire ! » J’encourage à mon tour, avant qu’il ne réponde finalement sur un ton plus doux et gentil que je ne l’avais jamais entendu parler, même un rire ! Qu’on applaudisse le monsieur ! Il a ri ! Improbable mais vrai. La foule est en délire. Reprenons nos esprits. « Ah cette fameuse soirée ! Qu’est-ce qu’on en a entendu parler ! N’est-ce-pas Ozzie ? » Je demande goguenard, avec un sourire complice. Il avait suffi d’un sms pour déclencher des semaines de conversation.

Et ce bien sûr, sans nous épargner le moindre petit détail croustillant.

Oswald et Ruben. Je les connaissais avant mêle de les avoir rencontrés. Kellen s'était fait une devoir de me faire un rapport détaillé sur les meilleurs amis de la femme qui partageait désormais sa vie. Et ce n'était pas vraiment glorieux, sur le principe. Enfin, disons qu'ils étaient bien à l'opposé de l'homme sérieux qu'était le mien. Des abrutis finis qui me donnent envie de me jeter par la fenêtre la plus proche, point à la ligne. Et je peux presque le deviner, à l'air de pure malice qui pétille dans les yeux bleus de mon interlocuteur. « Beaucoup de patience. Et une poêle à frire, toujours à portée de main. » je murmure, amusée. Puis je lui fais remarquer qu'ils ne me sont pas inconnus, sur le papier. « Un tas de choses. » je rajoute, volontairement mystérieuse. Puis l'attention est soudainement tournée vers le fils de Louve, qui finit par prendre son courage pour interroger Kellen sur le métier qu'ils partageaient avec Poppy. Et ça me tire un tendre sourire, alors je pose ma tête dans le creux de ma main pour voir mon meilleur ami se dépatouiller avec un petit garçon. Mais il prend le temps de choisir son anecdote et je laisse échapper un petit gloussement malgré cette piqûre de rappel d'une mission qui aurait pu leur coûter la vie, sans le réflexe de la rousse. Haussant un sourcil à la réflexion du brun à mes côtés. « Ah oui ? » je lui demande, avant de siroter une gorgée de ma boisson. Puis je désigne l'enfant à Kellen, d'un mouvement du menton. « Je crois qu'il aimerait beaucoup entendre d'autres histoires. » je souffle, avec un large sourire tout à fait innocent.
   

J’ignorais si Oswald avait des fâcheuses tendances suicidaires ou si il tenait aussi peu à sa vie pour chercher autant de noises au compagnon de Poppy. Peut-être un peu des deux, après tout. Cela dit, et cette pensée n’était pas là pour offenser qui que ce soit, je me doutais que l’homme qui partageait la vie de la rousse parlait bien plus qu’il n’agissait. Et malheureusement, son regard furieux et ses menaces ne suffisaient pas à faire taire le brun à mes côtés, bien au contraire. Il s’amusait véritablement comme un petit fou et ne pouvait pas s’empêcher d’en rajouter plusieurs couches. J’avais vraiment rencontré un spécimen hors norme et d’une qualité surprenant. Il n’y avait, effectivement, pas un seul jour qui s’écoulait sans qu’il ne me surprenne. Mais ça faisait partie de ses charmes et des raisons pour lesquelles j’étais tombée amoureuse. Puis nous nous installons à table et mon regard se pose sur mon fils qui observe Kellen avec un mélange d’admiration et d’interrogations. Je l’incite alors à poser toutes les questions qui lui brûlent les lèvres avant de pousser un soupir mi-amusé mi-consterné par la réaction de mon partenaire. « Tu ne t’arrêtes donc jamais ? » je demande dans un murmure, sans arriver à me défaire de mon sourire. Puis j’écoute, moi aussi, avec une attention toute particulière le récit, jetant des petits coup d’oeil à Auggie qui boit les paroles de notre hôte. Sa bouche s’ouvre en grand, scotché par les événements qu’ils avaient traversés. « Elle a explosé ?! Et vous avez fait comment ? » demande-t-il en trépignant sur sa chaise. « Ça fait mal des chaussures à talons ? Trop forte, tata ! » Ses yeux pétillent et je le vois se redresser d’un bond pour partir en courant chercher quelque chose dans son sac-à-dos. Je profite de son départ pour me tourner vers les deux principaux concernés, jonglant entre le visage de Poppy, puis de Kellen. « Elle a quoi de si particulier, cette soirée ? » Oui, moi aussi, j’étais curieuse. Ma petite tornade revient une poignée de minutes plus tard, dans son adorable costume de policier, tout fier de le montrer à tout le monde, mais surtout à nos deux agents.

Tu ne t’arrêtes donc jamais ? Mon sourire s'élargit davantage et je penche la tête sur le côté. « Je suis infatigable. » je souffle, goguenard. « Mais ça tu l'avais déjà remarqué, n'est-ce pas ? » je rajoute sur un ton tout aussi bas, les yeux pétillants d'amusement. Puis je dépose un baiser furtif sur l'épaule de la brune, me redressant pour inciter Kellen à raconter des histoires au petit garçon, qui n'attendait que ce moment depuis un certain temps. Et je retiens à peine un rire en le voyant ouvrir grand les yeux, accompagnant ses commentaires de grands gestes. Auggie était un garçon si vif, qui avait tant de choses à rattraper et le voir aussi heureux me remplissait d'une joie profonde. D'un seul coup, il bondit de chaise et disparaît pour aller fouiller dans son sac à dos. Un ricanement m'échappe à la réflexion de Ruben et je pose mon menton dans les paumes de mes mains. « Il paraît qu'elle s'est plutôt bien terminée, d'après Poppy. » je déclare, avec un rictus aussi large que celui du chat de Cheshire. « Tu as été d'un grand réconfort, Monsieur Grognon. » Il s'était fait un plaisir de débarrasser son bureau pour lui faire un peu de place, d'après notre meilleure amie. Mais je n'ai pas le temps d'en dire plus que la crapule revient, beau comme un camion dans son costume de policier. « N'est-il pas adorable ??? » j'interroge l'assemblée, prenant l'air le plus innocent de la planète.

Je couine. C'est bon pour tout le monde ? Oui ? Très bien. Je ne réponds littéralement plus de rien, mon cerveau refuse d'aligner deux pensées cohérentes à la suite. La faute d'Auggie et son excitation presque contagieuse et de sa façon beaucoup trop mignonne pour ma santé mentale de m'appeler tata. Je suis une personne faible, moi, messieurs, dames. Et ça sans compter sur la réaction de Kellen, tout aussi adorable, pour lui raconter nos péripéties au travail. Bien que je n'ai jamais douté de son talent avec les enfants, je suis sincèrement surprise de le voir s'y prendre aussi bien avec le fils de Louve. Il cache plutôt bien son jeu, le fourbe. Tellement bien que cette scène me fait fondre sur place et que si nous n'étions pas le 24 décembre, que nous n'étions pas entourés de nos proches, je lui sauterais très certainement dessus pour lui faire un bébé immédiatement. (Quand je disais que mon cerveau refusait d'aligner deux pensées cohérentes...) Mais cet instant de pure mignonneries prends fin prématurément quand Ruben fait allusion à la fin de la soirée et je me fige, les joues devenues subitement bien rouges. Ah ah ah. Mon regard jongle entre tous nos convives, s'arrêtant plus intensément sur mes deux meilleurs amis, pour les foudroyer du regard. Ils voulaient la guerre, ces deux-là. « Oswald. » je marmonne, les dents serrés. J'allais le tuer, en fait. Plus le ressusciter et le tuer de nouveau. « Je suis certaine que cette partie de l'histoire n'intéresse personne et encore moins Auggie. » Donc laissons mon incroyable partenaire raconter n'importe quelle autre anecdote, de préférence une où le bonus de fin n'est pas connu par les deux abrutis qui me servent d'amis. Fort heureusement, le petit garçon refait son apparition, un costume de policier sur le dos et je craque complètement. « Je crois qu'il est prêt pour entendre d'autres histoires. » Et m’éviter une crise cardiaque prématuré, par la même occasion.

Une histoire, une histoire ! Mes yeux viennent rouler dans leurs orbites. J'avais dit que j'allais devoir chaperonner plus d'un enfant, ce soir. Même si j'aurais préféré ne pas avoir à surveiller les paroles ainsi que les faits et gestes de deux hommes adultes. Mais le visage d'August est traversé par une profonde curiosité, ainsi qu'une admiration sans bornes pour notre métier. Et je ne résiste pas à lui résumer notre mission chez Gúzman, où ma voiture avait littéralement explosé en pleine marche. Ainsi que la manière peu orthodoxe de combat qu'avait utilisé Poppy pour se défendre. Le petit garçon exulte de joie, trépigne sur sa chaise et ça me tire un léger sourire amusé. « Nous avons sauté de la voiture au dernier moment. » je souffle, en faisant mine de réfléchir. « Il s'est passé beaucoup de choses, ce jour-là. » je rajoute, avant de tendre soudainement l'oreille, devant les paroles de ses meilleurs amis. Louve interroge son compagnon sur les confessions de la rousse et je plisse les yeux, soupçonneux. Celle-ci tente de détourner la conversation mais je reprends le fil, intrigué. « Non, continue Landolt. Je suis particulièrement intéressé de savoir ce qu'elle vous a dit sur cette mission. » Avant de me figer d'un seul coup, les lèvres pincées. Glissant un regard en coin à la femme qui partageait ma vie. Il paraît qu'elle s'est plutôt bien terminée, d'après Poppy. Nom de Dieu. Tu as été d'un grand réconfort. « Sérieusement ? » je souffle, à l'intention de la jeune femme. Je pouvais sentir mes joues cuire légèrement. Mais le retour du garçon permet à la conversation de s'orienter sur autre chose et je remercie silencieusement l'enfant pour revenir à cet instant. « Ton costume te va très bien, August. » je le complimente, avant de prendre une nouvelle gorgée de mon verre. « Maintenant c'est Poppy qui va te raconter une super histoire. Vu qu'elle est plutôt bavarde, quand elle s'y met. » je lâche, railleur.